Vous le savez, le 8 mars, nous avons officiellement inscrit dans notre Constitution la liberté pour la femme d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse. Un jour historique à bien des égards.
Historique pour toutes les femmes de notre pays d’abord, car si la mesure est avant tout symbolique, les symboles ne sont jamais dénués de sens ni de portée. Ici, la République reconnaît et garantit aux femmes le droit de pleinement disposer de leurs corps, jusque dans son texte le plus sacré. Que la société toute entière, celle-là même qui 50 ans auparavant condamnait, celle-là même qui contraignait les femmes à avorter clandestinement, honteusement, parfois au péril de leur vie, cette société se tient aujourd’hui à leur côté pour soutenir et protéger. L’avortement n’est jamais un acte anodin, et notre société fait aujourd’hui un peu plus le choix d’accompagner, avec dignité et bienveillance, toutes les femmes qui devront y recourir un jour.
Historique également, par la portée de ce symbole au-delà de nos frontières. Alors que les droits reproductifs et sexuels reculent, y compris dans des pays démocratiques, la France, en étant le premier pays à protéger le droit à l’avortement dans sa Constitution, envoie un message d’espoir aux femmes du monde entier. Ainsi, notre pays qui a un jour inspiré ses voisins par les idées libérales des Lumières et la déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen, est un petit peu plus devenu en ce 8 mars la patrie des des droits de la Femme. Et je forme le vœux que là aussi, notre idéal de justice, d’égalité et de liberté rayonne et inspire au-delà de nos frontières, car n’oublions pas que 40% des femmes dans le monde n’ont pas accès à cette liberté.
Historique enfin, plus personnellement cette fois. Ce vote, c’est aussi l’aboutissement d’un long parcours législatif, difficile, exigeant, incertain. Car la procédure l’exige, contrairement à la loi ordinaire, toute modification de la Constitution ne peut se faire qu’avec un accord des deux chambres sur un texte identique, l’Assemblée nationale et le Sénat sont à égalité et le consensus devient la règle. Je suis fière d’avoir pu contribuer à ce que le Sénat adopte le texte proposé. Ce n’était pas une tâche aisée, mais à force d’échanges et de discussions, nous avons réussi à rassurer et à convaincre nos collègues hésitants. L’adoption à une large majorité fait honneur au Sénat et montre que nous avons su être à la hauteur de l’événement.
De plus, j’ai eu l’honneur d’intervenir au congrès au nom de mon groupe. Un moment solennel et particulièrement fort pour moi, durant lequel j’ai eu l’occasion de rappeler que si l’IVG n’était pas particulièrement menacé aujourd’hui en France, nous n’étions jamais certain de l’avenir et qu’il ne fallait pas pécher par excès d’optimisme. Des réseaux militants, de mieux en mieux financés et organisés, existent et n'hésiteront pas à se servir des crises que notre pays aura forcément à connaître pour remettre en cause le droit des femmes. J’en veux pour preuve les campagnes d’affichages sauvages, les sites internet dispensant de prétendus conseils sur l’IVG mais cherchant surtout à en détourner les femmes, les propos tenus sur des chaînes d’informations en continu… Même si je suis consciente qu’il reste des actions à mener pour que cette liberté votée soit accessible sur l’ensemble de notre territoire, c’est parce que ce droit a dû être conquis avant d’être acquis, et parce que nous refusons de devoir mener à nouveau le juste combat de nos mères et de nos grands-mères que cette Constitutionnalisation était nécessaire.
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