Dans un climat bien moins éruptif qu’en première lecture, l’Assemblée nationale a adopté la version définitive du projet de loi sur la sécurité globale. Un texte particulièrement débattu dans les deux chambres et dont certains articles ont suscité la polémique au risque d’ailleurs d’éclipser les nombreux apports des députés et sénateurs. À l’issue d’une Commission Mixte Paritaire conclusive, nous avons d’ailleurs vu nombre de nos propositions intégrer le texte final.
En effet, largement conçue par le ministère de l’Intérieur et portant sur un sujet particulièrement sensible pour l’exécutif à un an de la présidentielle, cette loi vise le renforcement des prérogatives des agents de police municipale et de sécurité d’une part et l’encadrement et l’accès facilité à des moyens techniques d’autre part. la philosophie fondamentale de ce texte, illustrée par le concept de « Sécurité Globale », repose sur une meilleure articulation du travail entre police, gendarmerie, police municipale et sécurité privée.
Ainsi, le texte prévoit une expérimentation dans le domaine de la police municipale. Prévue initialement pour trois ans, elle a été portée à cinq ans par le Sénat. Elle sera ouverte aux communes et intercommunalités volontaires comptant au moins 15 agents de police municipale et permettra aux policiers municipaux de constater par procès-verbal certains délits, d’immobiliser des véhicules ou de saisir des objets.
Le texte facilite également la mutualisation entre communes de leurs policiers et crée un cadre légal pour doter Paris d'une police municipale en 2026. Nous avons en outre, renforcé l’information des maires sur les suites judiciaires données aux infractions constatées sur leur commune. Trop souvent, les élus locaux n’étaient pas informés, au détriment de la gestion au quotidien de la sécurité et de la tranquillité de la commune.
Autre aspect de ce projet de loi, la sécurité privée, un secteur en pleine croissance, mais qui manque encore d’un véritable cadre. Grâce à ce texte, le contrôle sur la sous-traitance en cascade, la délivrance des titres professionnels et les possibilités de recrutement pour l’autorité publique sont renforcées.
Sur la question du visionnage par la Police municipale de la vidéo-surveillance, le Sénat a introduit plusieurs garanties techniques sur ce point et a souhaité que la Commission nationale de la vidéoprotection émette un avis officiel sur le projet de décret qui viendra fixer les modalités du dispositif. Un nouvel article, là aussi introduit par le Sénat, encadre le dispositif de vidéosurveillance des personnes gardées à vue ou retenues dans un centre de rétention administrative. Les caméras-piétons, que portent les agents en intervention, seront généralisées d’ici juillet 2021.
Le texte précise également les cas où le recours aux drones est admis. Ces cas ont été limités par le Sénat, encore une fois soucieux des libertés publiques : constat de certaines infractions graves, surveillance de lieux dangereux ou difficiles d'accès, manifestations en cas de risque de troubles très graves... Outre les forces de l’ordre, les sapeurs-pompiers et les personnels de la sécurité civile pourront en faire usage.
À l'initiative du Sénat toujours, une autorisation préalable sera nécessaire avant l'usage de drones pour des opérations de police. À titre expérimental pour cinq ans, les policiers municipaux pourront également recourir à des drones pour "assurer l’exécution des arrêtés de police du maire".
L’article 24, qui a particulièrement fait polémique, insère dans le Code pénal un nouveau délit de provocation à l'identification d'un policier ou gendarme en opération, "dans le but manifeste qu’il soit porté atteinte à son intégrité physique ou psychique". Une disposition introduite par les sénateurs élargit le délit d'embuscade aux agressions commises sur des policiers ou gendarmes en dehors de leurs heures de service ou sur leur famille. Enfin, une extension du droit au port d’arme en dehors du service vient autoriser policiers et gendarmes à garder leur arme de service lorsqu’ils pénètrent dans des établissements recevant du public.
L’examen du texte, toujours en cours à ce jour, par le Conseil Constitutionnel permettra de lever les derniers doutes sur une loi rendue nécessaire par l’évolution des menaces et le nouveau contexte sécuritaire, mais qui vise aussi à donner plus d’autonomie aux élus locaux dans la gestion de leur Police municipale.